Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/119

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Prêtresses, disposez la pompe solennelle
Par qui mes jours heureux vont commencer leur cours ;
Sanctifiez ma vie, et nos chastes amours.
J’ai vu les dieux au temple, et je les vois en elle ;
Qu’ils me haïssent tous, si je suis infidèle !…
Antigone, en ces lieux vous m’avez entendu ;
Aux vœux que vous formiez ai-je assez répondu ?
Vous-même prononcez si vous deviez prétendre
À voir entre vos mains l’esclave de Cassandre :
Sachez que ma couronne et toute ma grandeur
Sont de faibles présents, indignes de son cœur.
Quelque étroite amitié qui tous deux nous unisse,
Jugez si j’ai dû faire un pareil sacrifice.

Ils rentrent dans le temple ; les portes se ferment, le peuple sort du parvis.


Scène V

Antigone, Hermas.

Dans le péristyle.

Antigone

Va, je n’en doute plus, et tout m’est découvert ;
Il m’a voulu braver ; mais sois sûr qu’il se perd,
Je reconnais en lui la fougueuse imprudence
Qui tantôt sert les dieux, et tantôt les offense ;
Ce caractère ardent qui joint la passion
Avec la politique et la religion ;
Prompt, facile, superbe, impétueux, et tendre,
Prêt à se repentir, prêt à tout entreprendre.
Il épouse une esclave ! Ah ! tu peux bien penser
Que l’amour à ce point ne saurait l’abaisser :
Cette esclave est d’un sang que lui-même il respecte.
De ses desseins cachés la trame est trop suspecte ;
Il se flatte en secret qu’Olympie a des droits
Qui pourront l’élever au rang de roi des rois.
S’il n’était qu’un amant il m’eût fait confidence
D’un feu qui l’emportait à tant de violence.
Va, tu verras bientôt succéder sans pitié
Une haine implacable à sa faible amitié.


Hermas

À son cœur égaré vous imputez peut-être