Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/479

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Quels sont mes sentiments, et quelles sont mes vues.

MADAME AGNANT.

Ma foi, jusqu’à présent elles sont peu connues.

NINON., à Madame Agnant.

Vous voulez votre fille et de l’argent comptant ?

MADAME AGNANT.

Oui, mais rien ne nous vient.

NINON.

Il faut premièrement
Vous mettre tous au fait… Feu monsieur de Gourville
Me confia ses fils, et je leur fus utile :
Il ne put leur laisser rien par son testament ;
Vous en savez la cause.

MADAME AGNANT.

Oui.

NINON.

Mais, par supplément,
Il voulut faire choix d’un fameux personnage,
Justement honoré dans tout le voisinage,
Et bien recommandé par des gens vertueux
Et ses amis secrets, tous bien d’accord entre eux ;
Et cet homme de bien nommé son légataire,
Cet homme honnête et franc, c’est monsieur.

MONSIEUR GARANT., faisant la révérence à la compagnie.

C’est me faire
Mille fois trop d’honneur.

NINON.

C’est à lui qu’on légua
Les deux cent mille francs qu’en hâte il s’appliqua.
Des esprits prévenus eurent la fausse idée
Qu’une somme si forte et par lui possédée
N’était rien qu’un dépôt qu’entre ses mains il tient
Pour le rendre aux enfants auxquels il appartient ;
Mais il n’est pas permis, dit-on, qu’ils en jouissent
C’est un crime effroyable, et que les lois punissent.

À Monsieur Garant.

N’est-ce pas ?

MONSIEUR GARANT.

Oui, madame.

NINON.

Et ces graves délits,
Comment les nomme-t-on ?