Ma foi, n’est pas raisonnable qui veut[1].
Vous vous trompez : de son cœur on est maître :
J’en fis l’épreuve : est sage qui veut l’être ;
Et, croyez-moi, cette Acanthe, entre nous,
Eut des attraits pour moi comme pour vous ;
Mais ma raison ne pouvait me permettre
Un fol amour qui m’allait compromettre ;
Je rejetai ce désir passager,
Dont la poursuite aurait pu m’affliger,
Dont le succès eût perdu cette fille,
Eût fait sa honte aux yeux de sa famille,
Et l’eût privée à jamais d’un époux.
Je ne suis pas si timide que vous ;
La même pâte, il faut que j’en convienne,
N’a point formé votre branche et la mienne.
Quoi ! vous pensez être dans tous les temps
Maître absolu de vos yeux, de vos sens ?
Et pourquoi non ?
Mais la sagesse est tant soit peu suspecte ;
Les plus prudents se laissent captiver,
Et le vrai sage est encore à trouver.
Craignez surtout le titre ridicule
De philosophe.
Ce noble nom, ce nom tant combattu,
Que veut-il dire ? amour de la vertu.
Le fat en raille avec étourderie,
Le sot le craint, le fripon le décrie ;
L’homme de bien dédaigne les propos
Des étourdis, des fripons, et des sots ;
Et ce n’est pas sur les discours du monde
Que le bonheur et la vertu se fonde[2].