Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome7.djvu/238

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Quand je connais mon sang, faut-il qu’il dégénère ?
Les plaintes, les regrets et les pleurs sont perdus.
Reprenez avec moi vos antiques vertus,
Et, s’il en est besoin, raffermissez mon âme.
J’ai honte de pleurer sans secourir Datame.


Scène III.

les précédents, DATAME.
Datame.

Il apporte à tes pieds sa joie et sa douleur.

Astérie.

Que dis-tu ?

Azémon.

Que dis-tu ?Quoi ! Mon fils ?

Astérie.

Que dis-tu ? Quoi ! Mon fils ?Teucer n’est pas vainqueur ?

Datame.

Il l’est, n’en doutez pas ; je suis le seul à plaindre.

Astérie.

Vous vivrez tous les deux : qu’aurais-je encore à craindre ?
Ô ciel ! ô providence ! Enfin triomphe aussi
De tous ces dieux affreux que l’on adore ici !

Datame.

Il avait à combattre, en ce jour mémorable,
Des tyrans de l’état le parti redoutable,
Les archontes, Pharès, un peuple furieux,
Qui, trahissant ton père, a cru servir ses dieux.
Nous entendions leurs cris, tels que sur nos rivages
Les sifflements des vents appellent les orages ;
Et nous étions réduits au désespoir honteux
De ne pouvoir mourir en combattant contre eux.
Teucer a pénétré dans la prison profonde
Où, cachés aux rayons du grand astre du monde,
On nous avait chargés du poids honteux des fers,
Pour être avec toi-même en sacrifice offerts,
Ainsi que leurs agneaux, leurs béliers, leurs génisses,
Dont le sang, disent-ils, plaît à leurs dieux propices ;
Il nous arme à l’instant. Je reprends mon carquois,