Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome7.djvu/288

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278 DOx\ PÈDRE.

Seigneur, un mot de vous calmera sa colère. Mais, quand le péril presse et peut vous accabler, Avec vos oppresseurs il iaut dissimuler.

DON PKDRE.

À ma franchise, ami, cet art est trop contraire ; C’est la vertu du lâche… Ah ! d’un maître sévère, D’un cruel, d’un tyran, s’ils m’ont donné le nom. Je veux le mériter à leur confusion,

— Trop heureux les humains dont les âmes dociles —^Se livrent mollement aux passions tran({uilles ! — Ma vie est un orage ; et, dans les flots plongé,

— Je me plais dans l’abîme où je suis submergé.

— Rien ne me changera, rien ne pourra m’abattre.

MENDOSE.

Mon prince, à vos côtés vous m’avez vu combattre.

Vous m’y verrez mourir. ï\Iais portez vos regards

Sur ces gouffres profonds ouverts de toutes parts ;

Voyez de vos rivaux la fatale industrie.

Par des bruits mensongers séduisant la patrie,

S’appliquant sans relâche à vous rendre odieux.

Tromper l’Europe entière, et croire armer les cieux :

Des superstitions faire parler l’idole ;

Vous poursuivre à Paris, vous perdre au Capitole ;

Et par le seul mépris vous avez repoussé

Tous ces traits qu’on vous lance et qui vous ont blessé 1

Vous laissez l’imposture, attaquant votre gloire.

Jusque dans l’avenir flétrir votre mémoire !

DOX PÈDRE.

—Ah ! dure iniquité des jugements humains !

^Fantômes élevés par des caprices vains !

—^J’ai dédaigné toujours votre vile fumée ;

^^-Je foule aux pieds l’erreur qui fait la renommée. On ne m’a vu jamais fatiguer mes esprits A chercher un suflrage à Home ou dans Paris. J’ai vaincu, j’ai bravé la rumeur populaire : Je ne me sens point né pour flatter le vulgaire : Ou tombons, ou régnons. L’heureux est respecté ; Le vainqueur devient cher à la postérité ; Et les infortunés sont condamnés par elle. Rome de Transtamare embrasse la querelle ; Rome sera pour moi quand j’aurai combattu, Quand on verra ce traître, à mes pieds abattu.