Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome8.djvu/180

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Après avoir rempli sa brûlante carrière,
Au bord de l’horizon brille d’un feu plus doux,
Et, plus grand à nos yeux, paraît fuir loin de nous,
Loin des murs de Paris le héros se retire,
Le cœur plein du saint roi, plein du Dieu qui l’inspire.
Il marche vers Vincenne, où Louis autrefois,
Au pied d’un chêne assis, dicta ses justes lois,
Que vous êtes changé, séjour jadis aimable !
Vincenne[1], tu n’es plus qu’un donjon détestable,
Qu’une prison d’État, qu’un lieu de désespoir,
Où tombent si souvent du faîte du pouvoir
Ces ministres, ces grands, qui tonnent sur nos têtes,
Qui vivent à la cour au milieu des tempêtes ;
Oppresseurs, opprimés, fiers, humbles tour à tour,
Tantôt l’horreur du peuple, et tantôt leur amour.
Bientôt de l’occident, où se forment les ombres,
La nuit vint sur Paris porter ses voiles sombres,
Et cacher aux mortels, en ce sanglant séjour,
Ces morts et ces combats qu’avait vus l’œil du jour.

  1. On sait combien d'illustres prisonniers d'État les cardinaux de Richelieu et Mazarin firent enfermer à Vincennes. Lorsqu'on travaillait à la Henriade, le secrétaire d'État Le Blanc était prisonnier dans ce château, et il y fit ensuite enfermer ses ennemis. (Note de Voltaire, 1752.)