Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome8.djvu/224

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Au bruit de la trompette animant son courage,
Dans les champs de la Thrace un coursier orgueilleux,
Indocile, inquiet, plein d’un feu belliqueux,
Levant les crins mouvants de sa tête superbe,
Impatient du frein, vole et bondit sur l’herbe ;
Tel paraissait Egmont : une noble fureur
Éclate dans ses yeux, et brûle dans son cœur.
Il s’entretient déjà de sa prochaine gloire ;
Il croit que son destin commande à la victoire.
Hélas ! il ne sait point que son fatal orgueil
Dans les plaines d’Ivry lui prépare un cercueil.
Vers les ligueurs enfin le grand Henri s’avance ;
Et s’adressant aux siens, qu’enflammait sa présence :
« Vous êtes nés Français, et je suis votre roi[1] ;
Voilà nos ennemis, marchez, et suivez-moi ;
Ne perdez point de vue, au fort de la tempête,
Ce panache éclatant qui flotte sur ma tête ;
Vous le verrez toujours au chemin de l’honneur.
À ces mots, que ce roi prononçait en vainqueur,
Il voit d’un feu nouveau ses troupes enflammées,
Et marche en invoquant le grand Dieu des armées.
Sur les pas des deux chefs alors en même temps
On voit des deux partis voler les combattants.
Ainsi lorsque des monts séparés par Alcide
Les aquilons fougueux fondent d’un vol rapide,
Soudain les flots émus de deux profondes mers
D’un choc impétueux s’élancent dans les airs ;
La terre au loin gémit, le jour fuit, le ciel gronde,
Et l’Africain tremblant craint la chute du monde.

    :Altius ingreditur · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·

    · · · · · Tum, si qua sonum procul arma dedere,
    Slare loco nescit, micat auribus, et tremit artus,
    Collectumque premens volvit sub naribus ignem.
    Densa juba, et dextro jactata recumbit ia armo.
    (et Æn., XI, 492, 493, 496, 497) :
    Qualis, ubi abruptis fugit præsepia vinclis,
    Tandem liber equus, canipoque potitus aperto :
    · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·
    Emicat, arrectisque frémit cervicibus alte
    Luxurians, luduntque jubæ per colla, per armos.

  1. On a tâché de rendre en vers les propres paroles que dit Henri IV à la journée d'Ivry : « Ralliez-vous à mon panache blanc, vous le verrez toujours au
    chemin de l'honneur et de la gloire. » (Note de Voltaire, 1730.)