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LE Ti:.M['LE DU GOUT. 569

Quel(|ues lerons à la jeunesse, Et, quoique en robe, ou l'éeoutail, Chose assez rare à son espèce. Près de là, dans un cabinet Hue Girardou el le Puget ^ Embellissaient de leur sculpture, Le Poussin sagement peignait*, Le Brun fièrement dessinait ■- ; Le Sueur entre eux se plaçait^ : On l'y regardait sans murmure ; Et le dieu, qui de l'œil suivait Les traits de leur main libre et sûre. En les admirant se plaignait De voir qu'à leur docte peinture. Malgré leurs efforts, il manquait Le coloris de la nature :

��« J'ai appréliendc, dit le petit Cyrus, que cette liqueur ne fût du poison. — Du poi- « son! et comment cela? — Oui, mon papa. » En un autre endroit (liv. VII, part, i, art. Il), en parlant des jeux qu'on peut permettre aux enfants : « Une balle, un ballon, un sabot, sont fort de leur goût... » Et liv. Vif, part, ii, ch. 2, art. iv : « Depuis le toit jusqu'à la cave, tout parlait latin chez Robert Estionnc. » Il serait à souhaiter qu'on corrigeât ces mauvaises plaisanteri(;s dans la première cditien qu'on fera de ce livre, si estimable d'ailleurs. (Note de Voltaire, 1752.)

\. Girardon mettait dans ses statues plus de grâce, et le Puget plus d'expres- sion. Les bains d'Apollon sont de Girardon, ainsi que le mausolée du cardinal de Richelieu en Sorbonne, l'un des chefs-d'œuvre de la sculpture moderne. Le Milon et l'Andromède sont du Puget. {Id,, li33.)

2. Le Poussin, né aux Andelys en 1594, n'eut de maître que son génie et quelques estampes de Raphaël qui lui tombèrent entre les mains. Le désir de con- sulter la belle nature dans les antiques le fît aller à Rome, malgré les obstacles qu'une extrt'nic pauvreté mettait à ce voyage. Il y fit beaucoup de chefs-d'œuvre, qu'il ne vendait que sept écus pièce. Appelé en Franco par le secrétaire d'État des Noyers, il y établit le bon goût de la peinture; mais, persécuté par ses envieux, il s'en retourna à Rome, où il mourut avec une grande réputation, et sans fortune. Il a sacrifié le coloris à toutes les autres parties de la peinture. Ses sacrements sont trop gris : cependant il y a dans le cabinet de M. le duc d'Orléans un ravissement de saint Paul, du Poussin, qui fait pendant avec la vision d'Ézéchiel, de Raphaël, et qui est d'un coloris assez fort. Ce tableau n'est point déparé du tout par celui de Raphaël, et on les voit tous deux avec un égal plaisir. {Id., 1733.)

3. Le Brun, disciple de Vouet, n'a poché que dans le coloris. Son tableau de la famille d'Alexandre est beaucoup mieux colorié que ses batailles. Ge peintre n'a pas un si grand goût de l'antique que le Poussin et Raphaël, mais il a autant d'in- vention que Raphaël et plus de vivacité que le Poussin. Les estampes des batailles d'Alexandre sont plus recherchées que celles des batailles de Constantin par Ra- phaël et par Jules Romain. {Id-, 1733.)

4. Eustache Le Sueur était un excellent peintre, quoiqu'il n'eût point été en Italie. Tout ce qu'il a fait était dans le grand goût; mais il manquait encore do beau coloris.

Ces trois peintres sont à la tète do l'école française. {Id., 1733.)

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