Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome8.djvu/87

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Possédant, en un mot, pour n’en pas dire plus,
Les défauts de son sexe, et peu de ses vertus.
Ce mot m’est échappé, pardonnez ma franchise :
Dans ce sexe, après tout, vous n’êtes point comprise ;
L’auguste Élisabeth n’en a que les appas ;
Le ciel, qui vous forma pour régir des États,
Vous fait servir d’exemple à tous tant que nous sommes ;
Et l’Europe vous compte au rang des plus grands hommes.
« Déjà François Second, par un sort imprévu,
Avait rejoint son père au tombeau descendu ;
Faible enfant, qui de Guise adorait les caprices,
Et dont on ignorait les vertus et les vices.
Charles, plus jeune encore, avait le nom de roi :
Médicis régnait seule ; on tremblait sous sa loi.
D’abord sa politique, assurant sa puissance,
Semblait d’un fils docile éterniser l’enfance[1] ;
Sa main, de la discorde allumant le flambeau,
Signala par le sang son empire nouveau ;
Elle arma le courroux de deux sectes rivales.
Dreux[2], qui vit déployer leurs enseignes fatales,
Fut le théâtre affreux de leurs premiers exploits.
Le vieux Montmorency[3], près du tombeau des rois,
D’un plomb mortel atteint par une main guerrière[4],
De cent ans de travaux termina la carrière.
Guise[5] auprès d’Orléans mourut assassiné.
Mon père[6] malheureux, à la cour enchaîné,

  1. Racine avait dit dans Bajazet, acte Ier, scène ire :
    Traîne, exempt de péril, une éternelle enfance.
  2. La bataille de Dreux fut la première bataille rangée qui se donna entre le parti catholique et le parti protestant. Ce fut en 1562. (Note de Voltaire, 1730.)
  3. Anne de Montmorency, homme opiniâtre et inflexible, le plus malheureux général de son temps, fait prisonnier à Pavie et à Dreux, battu à Saint-Quentin par Philippe II, fut enfin blessé à mort à la bataille de Saint-Denis, par un Anglais nommé Stuart, le même qui l'avait pris à la bataille de Dreux, (Id., 1730.)
  4. Boileau, épître IV, vers 123, a dit:
    Déjà du plomb mortel plus d'un brave est atteint.
  5. C'est ce même François de Guise cité ci-dessus, fameux par la défense de Metz contre Charles-Quint. Il assiégeait les protestants dans Orléans, en 1563, lorsque Poltrot de Méré, gentilhomme angoumois, le tua par derrière d'un coup de pistolet chargé de trois balles empoisonnées. Il mourut à l'âge de quarante-quatre ans, comblé de gloire, et regretté des catholiques. (Id., 1730.)
  6. Antoine de Bourbon, roi de Navarre, père du plus intrépide et du plus ferme