Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome9.djvu/149

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Savant Picard, de son siècle ornement ;
Il prit Agnès et Jeanne pour son thème.
Que je l’admire, et que je me sais gré
D’avoir toujours hautement préféré
Cette lecture honnête et profitable
A ce fatras d’insipides romans
Que je vois naître et mourir tous les ans,
De cerveaux creux avortons languissants !
De Jeanne d’Arc l’histoire véritable
Triomphera de l’envie et du temps.
Le vrai me plaît, le vrai seul est durable[1].



De Jeanne d’Arc cependant, cher lecteur,
En ce moment je ne puis rendre compte ;
Car Dorothée, et Dunois son vengeur,
Et La Trimouille, objet de son ardeur,
Ont de grands droits ; et j’avouerai sans honte
Qu’avec raison vous vouliez être instruit
Des beaux effets que leur amour produit.



Près d’Orléans vous avez souvenance
Que La Trimouille, ornement du Poitou,
Pour son bon roi signalant sa vaillance,
Dans un fossé fut plongé jusqu’au cou[2].
Ses écuyers tirèrent avec peine,
Du sale fond de la fangeuse arène,
Notre héros, en cent endroits froissé,
Un bras démis, le coude fracassé.
Vers les remparts de la ville assiégée
On reportait sa figure affligée ;
Mais de Talbot les efforts vigilants
Avaient fermé les chemins d’Orléans.
On transporta, de crainte de surprise,
Mon paladin par de secrets détours,
Sur un brancard, en la cité de Tours,

    ment. M. Louis du Bois a vu un manuscrit de la Pucelle en quinze chants, in-4o de 257 pages, en tête duquel on lit : « Ex bibliotheca conventus et nosocomi regalis sancti Joannis-Baptistæ Religiosorum Parisiensium a Charitate nuncnpatorum, ordinis sancti Joannis de Deo, sub régula sancti Augustini, 1759. » (R.)

  1. Ce vers, par sa tournure et par l'idée qu'il exprime, rappelle celui-ci de Boileau (épitre IV, vers 43) :
    Rien n'est beau que le vrai, le vrai seul est aimable.
  2. Voyez chant IV.