Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome9.djvu/214

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C’est ce Dunois de Milan revenu,
Ce grand Dunois à Jeanne si connu ;
C’est La Trimouille avec sa Dorothée.
Elle était d’aise et d’amour transportée ;
Elle en avait sujet assurément :
Elle voyage avec son cher amant,
Ce cher amant, ce tendre La Trimouille,
Que l’honneur guide et que l’amour chatouille.
Elle le suit toujours avec honneur,
Et ne craint plus monsieur l’inquisiteur.



En nombre pair cette troupe dorée
Dans le château, la nuit, était entrée.
Jeanne y vola : le bon roi, qui la vit,
Crut qu’elle allait combattre, et la suivit ;
Et dans l’erreur qui trompait son courage,
Il laisse encor Agnès avec son page.



O page heureux, et plus heureux cent fois
Que le plus grand, le plus chrétien des rois
Que de bon cœur alors tu rendis grâce
Au benoît saint dont tu tenais la place !
Il te fallut rhabiller promptement ;
Tu rajustas ta trousse diaprée ;
Agnès t’aidait d’une main timorée,
Qui s’égarait et se trompait souvent.
Que de baisers sur sa bouche de rose
Elle reçut en rhabillant Monrose !
Que son bel œil, le voyant rajusté,
Semblait encor chercher la volupté !
Monrose au parc descendit sans rien dire.
Le confesseur tout saintement soupire,
Voyant passer ce beau jeune garçon,
Qui lui donnait de la distraction.



La douce Agnès composa son visage,
Ses yeux, son air, son maintien, son langage.
Auprès du roi Bonifoux se rendit,
Le consola, le rassura, lui dit
Que dans la niche un envoyé céleste
Était d’en haut venu pour annoncer
Que des Anglais la puissance funeste
Touchait au terme, et que tout doit passer ;
Que le roi Charle obtiendrait la victoire.
Charles le crut, car il aimait à croire.