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220 VARIANTES DU CHANT XIII.

'Je me tairai. Mais si j'osais pourtant,

  • 0 des beauti'S aujourd'luii la plus belle!

"0 tondre objet, noble, simple, touchant!

O potelée et douce La Tourncllc ' !

  • Si j'osais mettre à vos genoux charnus
  • Cc grain d'encens que Fou doit à Vénus;

Si je chantais cette haute fortune,

L'objet des vœux de Flavacourt la brune -;

  • Si je chantais ce tendre et doux lien.

Ce nœud si cher quoique si peu chrétien,

Formé, béni par la vieille éminence,

Maudit, rompu par ce prélat bigot,

Et resserré par ce grand roi de Franco,

Malgré l'avis et les serments d'un sot 3;

Si de l'Amour je déployais les armes;

Si je disais... non, je ne dirai mot ;

  • Je serais trop au-dessous de vos charmes.

'Dans son extase enfin le moine noir

'Vit à plaisir ce que je n'ose voir.

  • D'un œil avide, et toujours trè.s-modeste,
  • I1 contemplait le spectacle céleste

De tous ces rois accouplés bout à bout :

Charles Second sur la belle Portsmouth ;

George Second sur la tendre Yarmoutli;

Et ce dévot roi de Lusitanie *

En priant Dieu se pâmant sur sa mie;

Et ce Victor ^, attrapé tour à tour

1. Mme do La Tournolle, née Mailly*, prit le titre de duchesse de Chàteauroux, en accep- tant la place de maîtresse du roi. Elle était d'une beauté singulière. On sait avec quelle rudesse de zèle l'évoque de Soissons, Fitz-Jamcs, petit-fils de Mlle de Churchill, maîtresse de Jacques II, traita une femme qui avait en Franco la même dignité que sa grand'mère avait eue en Angleterre.

Cet évêque était un homme simple, tolérant, bon, et sans intrigue; mais par là même très- propre à se rendre, sans le savoir, l'instrument des intrigants de la cour. On lui fit accroire qu'il était oblige en conscience de forcer le roi à traiter sa maîtresse avec une rigueur à peine excusable s'il eût été question de chasser de la cour un ministre qui aurait trahi l'État ou corrompu le monarque.

M^e de Chàteauroux fut rappelée bientôt après; le roi envoya chez elle un ministre d'État (M. le comte de Maurepas, son ennemi) la prier de sa part de vouloir bie:i reprendre ses places à la cour. Elle tomba malade le jour même, et mourut. On attribua sa mort aux vio- lentes émotions qu'elle avait éprouvées. Dans le moment de sa faveur, on se déchaîna contre elle, comme c'est l'usage. « La pauvre femme! disait un do ses amis, elle n'est qu'à plaindre; c'est une tuile qui lui est tombée sur la tète. » Il avait raison : la faveur ne valut à M^^ do Chà- teauroux que de la contrainte, des chagrins, et une mort prématurée. (K.l

2. M"* de Flavacourt" était sœur de M""» do Chàteauroux. On prétendait qu'elle aspirait à la même place ; et les courtisans attribuaient à ses vues ambitieuses la résistance qu'elle avait opposée au goût passager du roi. (K.)

3. Ces vers de l'édition do 1756 furent faits pendant le siège de Fribourg, époque du raccom- modement; mais la nouvelle faveur de M"« de Chàteauroux n'ayant duré qu'un moment, l'auteur a cru devoir les changer. (K.)

4. Jean V, roi de Portugal. Voltaire a dit de ce prince que ses fûtes étaient des proces- sions, ses édifices des monastères, el ses maîtresses des religieuses. (R.)

5. Victor-Amédée, roi de Sardaigne. (R.)

  • Marie-Anne de Mailly de Xeelle, née à Paris le 5 octobre 1717; mariée en 1734 au marquis de

La Tournelle ; morte le 8 déce.iibrc 1744. (R.)

•• Hortcnse-Félicité de Mailly de .\eelle, née 5 Paris le li février 1715, épousa, en 173D, Vraii^ois- Marie de Fouilleuse, marquis de Flavacourt. (R.)

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