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CHANT SEIZIÈME.

ARGUMENT
Comment saint Pierre apaisa saint George et saint Denis, et comment il promit un beau prix à celui des deux qui lui apporterait la meilleure ode. Mort de la belle Rosamore.

Palais des cieux, ouvrez-vous à ma voix.
Êtres brillants aux six ailes légères,
Dieux emplumés, dont les mains tutélaires
Font les destins des peuples et des rois !
Vous qui cachez, en étendant vos ailes,
Des derniers cieux les splendeurs éternelles,
Daignez un peu vous ranger de côté :
Laissez-moi voir, en cette horrible affaire,
Ce qui se passe au fond du sanctuaire :
Et pardonnez ma curiosité.
Cette prière est de l’abbé Trithème[1],
Non pas de moi ; car mon œil effronté
Ne peut percer jusqu’à la cour suprême ;
Je n’aurais pas tant de témérité.
Le dur saint George et Denis notre apôtre
Étaient au ciel enfermés l’un et l’autre ;
Ils voyaient tout ; mais ils ne pouvaient pas
Prêter leurs mains aux terrestres combats ;
Ils cabalaient : c’est tout ce qu’on peut faire
Et ce qu’on fait quand on est à la cour.
George et Denis s’adressent tour à tour
Dans l’empyrée au bon monsieur saint Pierre.
Ce grand portier, dont le pape est vicaire,
Dans ses filets enveloppant le sort,

  1. J’avoue que je ne l’ai point lue dans Trithême ; mais il se peut que je n’aie pas lu tous les ouvrages de ce grand homme. (Note de Voltaire, 1762.)