Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome9.djvu/347

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De sa Louvet, et de plaisirs rendu,
Sur son beau sein mollement étendu,
A sa poterne entend le bruit des armes ;
Il en triomphe. Il disait à part soi :
" Voilà mes gens, Orléans est à moi. "
Il s’applaudit de ses ruses habiles.
" Amour, dit-il, c’est toi qui prends les villes. "
Dans cet espoir Talbot encouragé
Donne à sa belle un baiser de congé.
Il sort du lit, il s’habille, il s’avance,
Pour recevoir les vainqueurs de la France.



Auprès de lui le grand Talbot n’avait
Qu’un écuyer, qui toujours le suivait ;
Grand confident et rempli de vaillance,
Digne vassal d’un si galant héros,
Gardant sa lance ainsi que les manteaux.
" Entrez, amis, saisissez votre proie, "
Criait Talbot ; mais courte fut sa joie.
Au lieu d’amis, Jeanne, la lance en main,
Fondait vers lui sur son âne divin.
Deux cents Francais entrent par la poterne ;
Talbot frémit, la terreur le consterne.
Ces bons Français criaient : " Vive le roi !
A boire, à boire, avançons ; marche à moi !
A moi, Gascons, Picards ! qu’on s’évertue,
Point de quartier ! les voilà, tire, tue ! "



Talbot, remis du long saisissement
Que lui causa le premier mouvement,
A sa poterne ose encor se défendre :
Tel, tout sanglant, dans sa patrie en cendre,
Le fils d’Anchise attaquait son vainqueur.
Talbot combat avec plus de fureur,
Il est Anglais ; l’écuyer le seconde :
Talbot et lui combattraient tout un monde.
Tantôt de front, et tantôt dos à dos,
De leurs vainqueurs ils repoussent les flots ;
Mais à la fin leur vigueur épuisée
Cède au Français une victoire aisée.
Talbot se rend, mais sans être abattu.
Jeanne et Dunois prisèrent sa vertu.
Ils vont tous deux, de manière engageante,
Au président rendre la présidente.