Page:Voltaire - Dictionnaire philosophique portatif, 6e édition, tome 2.djvu/137

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SÉLIM

Il me semble que Dieu a donné tout ce qu’il fallait à cette espèce ; des yeux pour voir, des pieds pour marcher, une bouche pour manger, un oesophage pour avaler, un estomac pour digérer, une cervelle pour raisonner, des organes pour produire leurs semblables.

OSMIN

Comment donc arrive-t-il que des hommes naissent privés d’une partie de ces choses nécessaires ?

SÉLIM

C’est que les loix générales de la nature ont amené des accidents qui ont fait naître des monstres ; mais en général l’homme est pourvu de tout ce qu’il lui faut pour vivre en société.

OSMIN

Y a-t-il des notions communes à tous les hommes qui servent à les faire vivre en société ?

SÉLIM

Oui, j’ai voyagé avec Paul Lucas, & partout où j’ai passé j’ai vu qu’on respectait son père & sa mère, qu’on se croyait obligé de tenir sa promesse, qu’on avait de la pitié pour les innocents opprimés, qu’on détestait la persécution, qu’on regardait la liberté de penser comme un droit de la nature ; & les ennemis de cette société comme les ennemis du genre hu