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Traité ſur la Tolérance. Chap. XI.

St. Paul, dans ſon Épître à quelques Juifs de Rome, convertis au Chriſtianiſme, employe toute la fin du Chapitre III à dire que la ſeule Foi glorifie, & que les œuvres ne juſtifient perſonne. St. Jacques, au contraire, dans ſon Épître aux douze Tribus diſperſées par toute la terre, Chapitre II, ne ceſſe de dire qu’on ne peut être ſauvé ſans les œuvres. Voilà ce qui a ſéparé deux grandes Communions parmi nous, & ce qui ne diviſa point les Apôtres.

Si la perſécution contre ceux avec qui nous diſputons, était une action ſainte, il faut avouer que celui qui aurait fait tuer le plus d’hérétiques ſerait le plus grand Saint du Paradis. Quelle figure ferait un homme qui ſe ſerait contenté de dépouiller ſes frères, & de les plonger dans des cachots, auprès d’un zélé qui en aurait maſſacré des centaines le jour de la St. Barthelemi ? en voici la preuve.

Le Succeſſeur de St. Pierre & ſon Conſiſtoire ne peuvent errer ; ils approuvèrent, célébrèrent, conſacrèrent l’action de la St. Barthelemi : donc cette action était très ſainte ; donc, de deux aſſaſſins égaux en piété, celui qui aurait éventré vingt-quatre femmes groſſes Huguenotes, doit être élevé en gloire du double de celui qui n’en aura éventré que douze : par la même raiſon les fanatiques des Cévennes devaient croire qu’ils ſeraient élevés en gloire à proportion du

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