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dialogues philosophiques

France, ou cent vingt-cinq millions de ducats d’or.

Les forces de l’État consistent, nous dit-on, dans une milice d’environ huit cent mille soldats. L’empereur a cinq cent soixante et dix mille chevaux, soit pour monter les gens de guerre, soit pour les voyages de la cour, soit pour les courriers publics.

On nous assure encore que cette vaste étendue de pays n’est point gouvernée despotiquement, mais par six tribunaux principaux qui servent de frein à tous les tribunaux inférieurs.

La religion y est simple, et c’est une preuve incontestable de son antiquité. Il y a plus de quatre mille ans que les empereurs de la Chine sont les premiers pontifes de l’empire ; ils adorent un Dieu unique, ils lui offrent les prémices d’un champ qu’ils ont labouré de leurs mains. L’empereur Kang-hi écrivit et fit graver dans le frontispice de son temple ces propres mots : « Le Chang-ti est sans commencement et sans fin ; il a tout produit ; il gouverne tout ; il est infiniment bon et infiniment juste. »

Yong-tching, fils et successeur de Kang-hi, fit publier dans tout l’empire un édit qui commence par ces mots : « Il y a entre le Tien et l’homme une correspondance sûre, infaillible, pour les récompenses et les châtiments. »

Cette religion de l’empereur, de tous les colaos, de tous les lettrés, est d’autant plus belle qu’elle n’est souillée par aucune superstition.

Toute la sagesse du gouvernement n’a pu empêcher que les bonzes ne se soient introduits dans l’em-