Page:Voragine - Légende dorée.djvu/210

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truction. Il dit d’abord qu’elle ne pouvait servir à rien, les écrits du saint s’étant répandus dans toutes les parties du monde. Et il ajouta que c’était un horrible sacrilège de détruire l’œuvre d’un homme sur la tête duquel il avait vu si souvent descendre l’Esprit-Saint sous la forme d’une colombe. Et le diacre dit que, pour attester la vérité de cette affirmation, il était prêt à mourir aussitôt ; et il déclara que, s’il n’obtenait point la mort qu’il demandait, il consentirait à ce que les livres de son maître fussent détruits. Car saint Grégoire lui avait dit que, si jamais il révélait le miracle de la sainte colombe, il mourrait sur-le-champ. Après quoi le vénérable Pierre revêtit son costume solennel de diacre, et jura, sur les saints Évangiles, la vérité de ce qu’il avait affirmé ; et, au moment où il achevait son serment, son âme s’envola au ciel sans éprouver les douleurs de la mort.

XVII. Un moine du monastère de saint Grégoire avait amassé une somme d’argent. Alors le saint apparut en rêve, à un autre moine et lui dit de signifier à son compagnon qu’il eût à distribuer son pécule et à faire pénitence, faute de quoi il mourrait le troisième jour. Ce qu’entendant, le moine, épouvanté, fit pénitence et distribua son pécule. Mais il n’en fut pas moins saisi d’une fièvre si forte que, pendant trois jours, il parut sur le point de rendre l’âme. Ses frères, l’entourant, chantaient des psaumes, jusqu’à ce que, le troisième jour, s’interrompant déchanter, ils se mirent à l’accabler de reproches. Mais voici que soudain le moine, revivant, et rouvrant les yeux avec un sourire, leur dit : « Que le Seigneur vous pardonne, mes frères, de m’avoir si durement jugé ! Et si désormais vous voyez quelqu’un en train de mourir, puissiez-vous lui accorder non des reproches, mais votre compassion ! Sachez donc que je viens de passer en jugement, avec un diable pour accusateur, et que, avec l’aide de saint Grégoire, j’ai bien répondu à toutes les objections de l’ennemi, sauf à une seule, que j’ai dû reconnaître pour fondée et à cause de laquelle j’ai subi ces trois jours de tortures. » Puis il s’écria : « Ô André, André, tu périras dès cette année, toi qui, par tes mauvais conseils, m’as exposé à