Page:Voragine - Légende dorée.djvu/299

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riaque, il le fit jeter parmi des serpents venimeux ; mais aussitôt les serpents périrent, sans faire aucun mal à l’évêque. Julien le fit jeter dans une chaudière pleine d’huile bouillante ; et Cyriaque, au moment d’y entrer, pria Dieu de lui accorder le second baptême du martyre. Sur quoi Julien, exaspéré, ordonna qu’on lui perçât la poitrine à coups de glaive ; et c’est ainsi que le saint évêque rendit son âme à Dieu.

Quant à la vertu souveraine de la sainte Croix, elle nous est prouvée par l’histoire d’un pieux intendant que certain magicien conduisit, par ruse, dans un lieu où il avait évoqué les démons. L’intendant aperçut dans ce lieu un grand Éthiopien, assis sur un trône élevé, et entouré d’autres noirs portant des lances et des verges. L’Éthiopien, qui était Lucifer lui-même, dit à l’intendant : « Si tu veux m’adorer et me servir, et renier ton Christ, je te ferai asseoir à ma droite ! » Mais l’intendant déclara qu’il préférait rester le serviteur du Christ ; et, au moment où il faisait le signe de la croix, toute la foule des démons s’évanouit. Plus tard, le même intendant entra, avec son maître, dans l’église de Sainte-Sophie ; et là, comme tous deux se tenaient debout devant une image du Christ, le maître vit que cette image avait les yeux fixés sur l’intendant. Il fit alors passer celui-ci à droite, puis à gauche : les yeux de l’image suivaient ses mouvements, et restaient toujours fixés sur lui. Le maître, émerveillé, demanda à son intendant par quoi il s’était rendu digne d’un si grand honneur. Et l’intendant répondit qu’il n’avait conscience d’aucun acte qui pût lui valoir cet honneur, à cela près qu’un jour, en présence du diable, il avait refusé de renier le Christ.