Page:Voragine - Légende dorée.djvu/525

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truit, il insista par ses prières et ses larmes pour forcer saint Gilles à en devenir l’abbé[1].

La renommée du saint parvint jusqu’au roi Charles, qui le manda près de lui et le reçut avec déférence. Il lui demanda, entre autres choses, de vouloir bien prier pour que lui fût remis un très grand péché qu’il avait commis jadis, et qu’il n’osait avouer à personne, pas même au saint. Et le dimanche suivant, pendant que Gilles, célébrant sa messe, priait pour le roi, un ange lui apparut qui déposa sur l’autel une feuille où était écrit que, grâce à ses prières, le péché du roi se trouvait pardonné. Et l’on dit aussi que, sur cette feuille, une main céleste avait ajouté que quiconque invoquerait saint Gilles pour la rémission d’un péché, obtiendrait cette rémission, pourvu seulement qu’il ne commît plus le même péché. Gilles porta la feuille au roi, qui se repentit humblement. Puis le saint reprit le chemin de son monastère. Et à Nîmes, en passant, il ressuscita le fils d’un des chefs de la ville, qui venait de mourir.

Peu de temps après, prévoyant que son monastère allait être saccagé par les ennemis, il se rendit à Rome, et obtint du pape, pour son église, un privilège, ainsi que deux portes en bois de cyprès où se trouvaient sculptées les images des apôtres. Après quoi, ayant confié ces portes au Tibre, et les ayant recommandées à la conduite divine, il retourna vers son monastère ; et, sur le chemin, à Tiberon, il guérit un paralytique. Et quand il revint à son monastère, il trouva les portes qui l’attendaient dans le port. Après avoir rendu grâces à Dieu, il les dressa au seuil de son église, tant pour l’ornement de celle-ci que pour qu’elles fussent le témoignage du pacte accordé au monastère par la curie romaine.

Enfin, comprenant par révélation que le jour de sa mort approchait, il en informa ses frères et leur demanda de prier pour lui. Et quand il se fût endormi dans le Seigneur, bien des personnes affirmèrent avoir entendu des chœurs d’anges transportant son âme au ciel. Cette mort eut lieu en l’an du Seigneur 700.

  1. À Saint-Gilles-du-Gard, entre Arles et Lunel, sur le petit Rhône.