Page:Wagner - À Mathilde Wesendonk, t1, 1905, trad. Khnopff.djvu/125

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supporter le terrible fardeau qui pèse sur mon cœur : — c’est un fardeau,… mais… c’est sur mon cœur qu’il pèse. — Un médecin, en qui j’ai toute confiance, m’a fait connaître hier la nature exacte de la maladie de ma femme. Il semble qu’elle soit perdue. Un hydrothorax menace de se développer sous peu ; elle va souffrir cruellement, longuement peut-être, la souffrance ira toujours croissant : l’unique délivrance possible est la mort. Ce qui peut seul adoucir son sort, c’est la plus grande tranquillité, l’éloignement de toutes préoccupations morales…. Aide-moi à soigner la malheureuse ! Je ne pourrai le faire que de loin, parce qu’il me faut considérer mon éloignement d’elle comme une nécessité absolue. J’en serais incapable de près ; puis ma proximité ne serait pour elle qu’une cause d’agitation. Il ne m’est possible de la tranquilliser que de loin ; car je me règle ainsi pour mes communications d’après mes loisirs et mes dispositions, de façon à ne jamais perdre de vue mon devoir envers elle. Mais ceci aussi, je ne le puis pas non plus, sans ton assistance. Je ne puis supporter d’apprendre que tu saignes, je ne puis supporter la misère d’être incapable de guérir tes blessures ! Cela me brise en mille pièces, et me conduit là d’où, cette nuit, je suis revenu encore une fois vers toi ! N’est-ce pas, mon ange ? Tu me comprends ? Tu sais que je suis à toi, et que toi seule disposes de mes


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