Page:Wagner - À Mathilde Wesendonk, t1, 1905, trad. Khnopff.djvu/66

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était close ; tu entrais par la portière du cabinet de travail, ainsi tu m’enveloppais de tes bras, ainsi je te regardais en mourant ! Et maintenant cette possibilité de mourir m’était également refusée ? Froidement, comme si j’en étais chassé, je quittais cette maison, où j’étais enfermé en compagnie d’un démon que je ne pouvais plus conjurer que par la fuite ! Où, où donc mourir, à présent ?… C’est ainsi que je m’endormis…

Un léger bruit, merveilleux, me fit sortir de mon cauchemar : en me réveillant, je sentis un baiser sur mon front ; un soupir pénétrant suivit. C’était si distinct que je me redressai et regardai autour de moi. Silence absolu. Je fis de la lumière ; il était un peu avant une heure, l’heure des revenants touchait à sa fin. Un fantôme avait-il veillé à mon chevet pendant cette heure maudite ? Veillais-tu ou dormais-tu pendant ce temps-là ?… Comment te sentais-tu ?… Impossible de refermer l’œil. Longtemps je m’agitai dans mon lit, puis je me levai, m’habillai complètement, donnai le dernier tour de clef à la dernière malle et attendis, plein d’angoisse, le jour, tantôt allant et venant par la chambre, tantôt m’étendant un peu sur le lit. Le jour me semblait tarder plus que dans mes nuits d’insomnie de l’été dernier. Avec la rougeur de la honte, le soleil se leva derrière les montagnes… Je regardai une der-

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