Page:Wagner - À Mathilde Wesendonk, t2, 1905, trad. Khnopff.djvu/265

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13.

La moindre nouvelle de vous, cher ami, est une pensée de vous à moi et, comme telle, la plus chère salutation que puisse désirer mon cœur ! Ma gratitude vous est donc acquise pour toute communication, si courte qu’elle soit ![1] Nous n’avons plus besoin que de telles communications, comme un lien invisible pour nous conduire à travers la vie, en face de l’immensité du monde sentimental, auquel nous appartenons. Le nœud de la mystérieuse Filandière qui unit les fils de nos destinées est indéliable ; on ne peut que le rompre. « Savez-vous comment cela advint ? — »

Je comprends votre désespoir, votre épuisement, et sais ce qu’il vous en coûte d’aller en Russie. Je ne trouve nulle part de ressources à votre intention ; j’ai beau me creuser la tête, impossible d’aboutir. Alors je me tais, plutôt que de vous illusionner de vides espoirs, auxquels je ne crois pas moi-même. C’est le plus triste sort de l’humanité de voir un mal sans pouvoir l’extirper. Il est né avec nous, et nous le traînons à contre-cœur, comme une maladie contagieuse. Cela me fit du bien de savoir que vous aviez Mme von Bissing à Löwenberg et à Breslau. Heureux ceux qui font du bien ici-bas ! Ils sont vraiment les seuls à connaître la félicité !

  1. Voir lettre no 144.