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DIX ÉCRITS DE RICHARD WAGNER

des droits d’auteurs, il en serait probablement en France comme il en est en Allemagne, où poètes et musiciens s’obstinent à rester isolés les uns des autres ; tandis que les susdits droits d’auteurs, qui sont vraiment une fort belle chose, ont amené plus d’une heureuse et fructueuse alliance de talents. Ce sont ces droits qui, si je ne me trompe, ont provoqué subitement chez M. Scribe, en dépit de sa nature, le goût des inspirations musicales, et qui l’ont décidé à écrire des livrets, qui serviront longtemps encore de modèles. Mais ce sont ces mêmes droits qui ont engagé aussi plus d’un poète célèbre à écrire des textes d’opéra, vaille que vaille, et les directeurs de nos établissements artistiques n’osent guère se montrer difficiles quand il s’agit des productions d’un auteur fameux, de sorte que les compositeurs sont obligés de se contenter de ce qu’on veut bien leur offrir ; et, en définitive, il ne résulte de cette association forcée que des productions médiocres paraissant sous l’auspice d’un nom illustre. Cela s’explique facilement : il est tout naturel que des œuvres conçues sans enthousiasme, élaborées dans un esprit d’aveugle routine, ne puissent enthousiasmer le public. Ce qui nous surprend, et ce que nous devons regarder comme une véritable bonne fortune pour l’art, c’est que de temps à autre cette manière de procéder enfante des créations qui ravissent le parterre et qui, de plus, soutiennent l’examen d’une critique rigou-