Page:Wagner - Lettres à Auguste Rœckel, 1894, trad. Kufferath.djvu/46

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bre infini de moyens pour comprendre le monde comme un Tout ; ces moyens ce sont les idées dans leurs plus diverses complications. Nous sommes assez orgueilleux pour qu’en voulant comprendre par de simples notions un Tout, — que nous nous imaginons volontiers posséder, — nous oublions que nous n’en possédons que l’idée ; c’est-à-dire que nous prenons plaisir à notre propre création, tandis que nous nous éloignons de plus en plus de la Réalité du monde. Mais celui qui, dans l’ivresse de cette illusion, ne peut se réjouir, celui-là finit par se rendre compte de son être propre, parce qu’il le sent non satisfait ; il reconnaît la tristesse de cette illusion orgueilleuse, et finalement comprend la nécessité de reprendre contact par le sentiment, et en pleine conscience, avec la Réa- lité. Seulement, comment la saisira-t-il, cette Réalité, qui, — comme Tout imaginaire, — n’est perceptible que par la pensée et non par le sentiment ? Il ne le pourra qu’en reconnaissant que l’essence de la Réalité consiste dans une infinie diversité. Cette diversité inépuisable, qui, sans cesse, crée et produit, est perçue par les sens, mais seulement comme manifestation isolée, variable. Cette variabilité est l’essence du Réel; l’Imaginaire seul est immuable. Il n’y a de vrai que ce qui varie : être vrai, vivre, — c’est : naître, grandir, fleurir, se flétrir et mourir; sans la nécessité de la mort, pas de possibilité de la vie; seul, ce qui n’a pas de commencement n’a pas de fin, — et rien de