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ANTHOLOGIE DES POETES FRANÇAIS A vous qui prenez part aux moissons immortelles, Sainte, à vous qui avez, dans les calmes chapelles, Vos prières, toujours, par l’Esprit agréées... O sœur, j’aime si fort mes pauvres mains créées, Et mon frère imparfait, l’homme à la chaude voix, Qui me fait tant de mal, mais qui baise mes doigts. Je n’aurais pas voulu votre magnificence, Et, comme vous, garder toute mon innocence. •Condamnez mes péchés au feu de votre enfer. Sachez que j’eus mon ciel parce que j’ai souffert, Et que, dans une extase encor plus que divine, JDe l’homme que j’aimai j’évoquai la poitrine. Je préfère rester la pauvre Eve qui meurt Dans le bruit indécis et triste de son cœur, •Celle que tout séduit et qui de rien n’est sûre, A qui tout est embûche, à qui tout est blessure, •Que rien ne récompense en raison de son mal... Mais qui fait ce beau geste humain et nuptial De dénouer sa robe et de donner sa gorge. Car l’homme, en plus de sa moisson de vin et d’orge, Veut le corps de la femme et son tendre sanglot. Allez, heureuse sœur, je préfère mon lot; J’ai l’orgueil de souffrir simplement pour la peine... D’avoir un cœur humain dans ma poitrine humaine... Cardez votre bonheur plein des anges des nuits, Votre félicité près de l’unique Maître... Moi, je veux demeurer la femme que je suis... Et pourtant, et pourtant, je succombe de l’être!... {Les Fresques.)