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les petits

un peu rétabli, on s’assit ; toutes les figures respiraient le bonheur, même celle de la pauvre aveugle. Un étranger qui serait entré n’aurait jamais pu distinguer, à l’expression des physionomies, celui qui recevait le bienfait, de celui qui le donnait. Ah ! c’est qu’il y a dans le bien que l’on fait une jouissance tellement vire, tellement profonde, que ce n’est pas celui qui reçoit qui goûte le plus de bonheur.



ix. — Le petit François.


— Je sais filer, dit la pauvre aveugle en se tournant du côté où elle supposait le curé, je filerai toute la sainte journée, et je pourrai tricoter aussi.

Le curé sourit et dit :

— Ce n’est pas de refus ; ma ménagère a peu de temps à elle, et une maison n’est jamais trop approvisionnée de bon linge. J’use aussi beaucoup de bas de laine l’hiver ; j’ai de si longues courses à faire !

L’aveugle se redressa et sa figure s’épanouit ; on voyait qu’elle était fière de penser qu’elle ne serait pas inutile.

— Et moi, dit le vieillard, je pourrai aller aux champs, je pourrai faire des fagots et aider à tout ce qui ne demandera pas trop de force, car si les jambes vont encore, les bras ont perdu de leur vigueur ; cela n’empêche pas qu’ils ne puissent manier la bêche et la faucille, ajouta-t-il en les agitant.

— Vous nous serez très utile, reprit le fermier en lui frappant sur l’épaule ; vous et votre petit-fils, vous ne man-