Page:Walter - Voyage autour du monde fait dans les années 1740, 1, 2, 3, 4, 1749.djvu/107

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

de terre : car leurs côtés sont à peu près perpendiculaires, et elles paroissent pénétrer dans la substance des rochers, jusqu’à leurs racines. Enfin on ne peut rien imaginer de plus triste et de plus sauvage, que le coup d’œil qu’offre cette côte. J’ai dit que ce fut le 7 de Mars, que nous découvrimes l’embouchure du Détroit de le Maire ; peu après, c’est-à-dire, à dix heures du matin, la Perle et le Tryal, s’étant, suivant les ordres qu’ils en reçurent, mis à la tête de l’Escadre, nous entrames dans le Détroit avec un beau tems et un vent frais, et le passames en deux heures à la faveur d’une forte marée, quoiqu’il ait sept à huit lieues de longueur. C’est ici que finit l’Océan Atlantique, et que la Mer Pacifique commence ; ainsi ne nous représentant plus qu’une Mer ouverte entre nous et les riches Contrées où se rapportoient nos espérances et où tendoient nos desirs, nous ne pouvions nous empêcher de croire que les plus grands travaux de notre Voyage étoient finis, et que nous étions sur le point de voir réaliser toutes les richesses que nous avions jamais imaginées en songe. Nous formions des plans de bonheur tels qu’il nous plaisoit, et nous les fondions sur la possession de tout l’or du Chili et de tout l’argent du Pérou ; l’imagination étoit animée par le plus beau jour que nous eussions eu depuis notre départ d’Angleterre. C’est dans cette disposition charmante que nous passames ce Détroit fameux : nous étions, comme on voit, bien éloignés de penser que les plus affreux malheurs étoient prêts à fondre sur nous ; que nous allions dans peu être séparés pour ne nous plus rejoindre, et que c’étoit le dernier jour agréable que la plupart d’entre nous devoient voir.