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qui se trouvoit impraticable, et de retourner à l’Ile du Wager, qu’ils regagnèrent vers le milieu de Février, découragés au dernier point, et mourans de faim et de fatigue.

A leur arrivée à cette Ile, ils eurent le bonheur de trouver plusieurs morceaux de viande salée, emportées du Vaisseau échoué et qui flottoient sur la Mer. Ce secours leur vint le plus à propos du monde, et pour comble de bonheur, il arriva peu après en cet endroit, deux Canots d’Indiens. Un de ces Sauvages, natif de Chiloé, parloit un peu l’Espagnol. Comme le Chirurgien, qui étoit resté avec le Capitaine Cheap, entendoit cette langue, il conclut avec l’Indien, un marché par lequel ce dernier s’engageoit à conduire le Capitaine et les gens dans leur Bateau à rame, à Chiloé, à condition que ce Bâtiment et tout ce qui y appartenoit lui demeureroit pour sa peine. Après cet accord, les onze personnes, à quoi toute cette Troupe étoit réduite, s’embarquèrent dans le Bateau à rame, le 6 de Mars, pour cette nouvelle expédition ; mais, peu de jours après, le Capitaine et quatre de ses principaux Officiers, étant à terre, les six autres qui étoient restés dans le Bateau à rame avec un autre Indien, remirent en Mer et ne revinrent point. Ceux qui furent laissés à terre avec le Capitaine Cheap, étoient, Mr. Byron, Mr. Hamilton, Lieutenant de la Marine, Campbell, Bas Officier, et Elliot, Chirurgien. Il y avoit déja longtems que leurs malheurs paroissoient arrivés au comble ; mais ils s’apperçurent bien alors que la situation, où ils se trouvoient, étoit beaucoup plus triste, que toutes celles par lesquelles ils avoient passé. Ils se voyoient abandonnés sur une Côte déserte, sans vivres et sans aucun moyen d’en recouvrer ; armes, munitions, hardes, tout en un mot étoit resté dans le Bateau à rame, à l’exception des chétifs habits dont ils étoient couverts.

Ils avoient eu tout le tems de peser toutes les circonstances de leur malheur, et de se persuader qu’il étoit sans remède, lorsqu’ils découvrirent dans le lointain un Canot ou se trouvoit avec sa famille l’Indien, qui avoit entrepris de les conduire à Chiloé. Il ne fit aucune difficulté de venir les joindre, car il n’avoit quitté nos gens que pour aller pecher, et les avoit en attendant confié à cet autre Indien, que ceux qui étoient restés dans le Bateau à rame, avoient emmené avec eux. Mais lorsqu’il fut à terre, et qu’il ne vit plus ni le Bateau à rame, ni son Compagnon, il en parut frappé, et on eut grand’peine à lui persuader que cet autre Indien n’avoit pas été massacré. Enfin pourtant convaincu par tout ce