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moindre importance, tels que des Ouvrages d’Orfèvrerie, dont la рlus grande partie se travaille par des Chinois, établis à Manille même, ou il y en a plus de vingt mille Domestiques, Ouvriers, Courtiers ou Fripiers. Toutes ces Marchandises sont transportées par le moyen d’un Vaisseau, quelquefois de deux, qui partent tous les ans de Manille, pour Acapulco.

Ce Commerce n’est pas libre pour tous les habitans de Manille, il est restraint à certaines personnes, par plusieurs ordonnances, à peu près dans le goût de celles qui règlent celui des Vaisseaux de Regître qui partent de Cadis pour les Indes Occidentales. Les Vaisseaux qui sont employés à celui de Manille sont entretenus par le Roi d’Espagne, qui en paye les Officiers et l’Equipage, et la Charge en est divisée en un certain nombre de Bâles, d’égale grandeur. Ce nombre est distribué entre les Couvents de Manille, et les Jésuites y ont de beaucoup la meilleure part. C’est une espèce de gratification que le Roi leur fait, pour soutenir leurs Missions, destinées à la Propagation de la Foi Catholique ; et chaque Couvent a droit de charger sur le Galion une quantité de Marchandises, proportionnée au nombre de Bâles qui lui est assigné ; ou s’il l’aime mieux il peut vendre et transporter ce droit à tout autre. Or comme le Marchand qui achète ce droit, n’est pas toujours assez bien fourni, pour le faire valoir de son propre fond, Les Couvents s’accomodent avec lui, et lui font des avances considérables à la grosse avanture.

Les Ordonnances du Roi ont limité ce Commerce à une certaine valeur de Marchandises, qu’il n’est pas permis d’excéder. Suivant quelques Manuscrits Espagnols, qui m’ont passé sous les yeux, cette valeur est fixée à 600000 Piastres. Certainement cette Loi est mal observée, et il n’y a peut-être pas d’année que cette Cargaison n’excède de beaucoup cette somme. Il est difficile d’estimer au juste à quoi elle peut monter, mais je crois être bien fondé à assurer que les Retours montent rarement à moins de trois Millions de Piastres.

On croira aisément que la plus grande partie de ces Retours ne reste pas dans Manille, et qu’elle se distribue dans toutes les Indes Orientales. C’est une maxime de politique admise par toutes les Nations Européennes, qu’on doit tenir les Colonies d’Amérique dans la dépendance la plus absolue à l’égard de leur Métropole, et qu’on ne doit leur permettre aucun Commerce lucratif avec d’autres Nations commerçantes ; aussi n’a-t-on pas manqué de faire souvent des représentations au Conseil d’Espagne, sur ce Commerce entre le Méxique et le Pérou et les Indes Orientales.