Page:Walter - Voyage autour du monde fait dans les années 1740, 1, 2, 3, 4, 1749.djvu/345

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noncer à la flatteuse attente de se signaler par quelque Expédition glorieuse.

Mais ces accablantes réflexions cessèrent de le tourmenter, quand il s’apperçut, que les deux prétendues Chaloupes, qu’il voyoit dans l’éloignement, étoient des Pros Indien. Comme il remarqua que ces Pros dirigeoient leur cours vers le rivage, il ordonna qu’on ôtât tout ce qui auroit pu leur donner le moindre soupçon, et fit cacher ses Gens dans des Haliers, afin de s’assurer des Indiens, dès qu’ils seroient arrivés à terre : après que les Pros, furent avancés jusqu’à un quart de mille de terre, ils s’arrêtèrent tout court, et étant restés immobiles durant près de deux heures, ils portèrent au Sud. Mais revenons à l’exécution du dessein d’allonger la Barque.

Si l’on considère combien nos Gens étoient mal pourvus de tout ce qui leur étoit nécessaire pour exécuter ce dessein, on aura lieu d’être convaincu, qu’indépendamment de plusieurs autres articles aussi importans, la seule entreprise d’allonger la Barque étoit accompagnée de grandes difficultés. Ces difficultés auroient été beaucoup moindres dans un endroit pourvu des matériaux et des instrumens nécessaires ; mais quelques-uns de ces instrumens devoient encore être fabriqués, et plusieurs des matériaux manquoient absolument ; et il ne falloit pas un médiocre degré d’industrie pour suppléer à tout cela. Quand le corps de la Barque auroit été achevé, ce n’auroit été là qu’un seul article ; et il en restoit encore plusieurs autres de la même importance : il falloit pourvoir la Barque d’Agrés, l’avitailler, et enfin lui faire parcourir un espace de six ou sept cens lieues, dans des Mers, où aucun de nous n’avoit jamais passé. Quelques-uns de ces articles étoient accompagnés de difficultés assez grandes pour rendre l’exécution de l’entreprise impossible, et tous les efforts de nos Gens inutiles, sans divers accidens favorables et inattendus. Je vais donner un détail abrégé du tout.

Par un très grand bonheur les Charpentiers, tant du Gloucester que du Tryal, étoient à terre avec leurs Caisses d’instrumens, quand le Vaisseau fut jetté en mer. Le Forgeron s’y trouvait pareillement, et avoit avec lui sa forge et quelques outils, mais ses soufflets étoient restés à bord, desorte qu’il ne lui étoit point possible de travailler, et sans lui il n’y avoit rien à faire. Le premier soin de nos Gens fût de fabriquer une paire de soufflets. Il leur manquoit cependant du cuir ; mais ils y suppléèrent par des peaux, dont ils avoient suffisamment : car ayant trouvé un tonneau de çhaux, que les Indiens ou les Espagnols avoient préparé pour leur usa-