Page:Walter - Voyage autour du monde fait dans les années 1740, 1, 2, 3, 4, 1749.djvu/346

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ge, ils se servirent de cette chaux pour tanner quelques peaux ; et quoique l’ouvrage dût naturellement n’être pas fort bon, le cuir ne laissa pas de servir, et les soufflets dont le Canon d’une arme à feu étoit le tuyau, n’avoient d’autre défaut que la mauvaise odeur d’un cuir mal préparé.

Pendant que le Forgeron travailloit à son ouvrage, d’autres abattoient des arbres, et en scieoient des planches ; et comme c’étoit là le travail le plus pénible, le Commandeur y mit lui-même la main pour encourager davantage ses Gens. Comme ils n’avoient, ni assez de poulies, ni la quantité nécessaire de cordages pour haler la Barque à terre, on proposa de la mettre sur des rouleaux. La tige des Cocotiers étant fort unie et cylindrique, fut jugée très propre à leur fournir les rouleaux dont ils avoient Ьеsoin. On abatit donc quelques-uns de ces arbres, aux bouts desquels on pratiqua des ouvertures pour recevoir des barres. Dans ce même tems on creusa un bassin sec, ou l’on fit entrer la Barque par un chemin fait exprès depuis la Mer jusqu’au bassin. Tandis que les uns travailloient à allonger la Barque, les autres tuoient des Bœufs, et amassoient toutes sortes de provisions : et quoique naturellement on eût lieu de craindre, que, dans un si grand nombre d’occupations différentes, il ne se mêlât de la négligence et de la confusion, le bon ordre, qui avoit été établi, et l’ardeur, que chacun marquoit à remplir sa tâche, firent néanmoins avancer l’ouvrage à souhait. Je crois que le manque de liqueurs fortes contribua beaucoup à rendre nos Gens d’aussi bonne volonté, Comme ils n’avoient à terre ni vin ni eau de vie, le jus de noix de Coco leur servoit constamment de boisson, et cette boisson, quoique très agréable, n’étoit nullement enivrante.

Les Officiers ayant délibéré sur tout ce qu’il faudroit pour équiper la Barque, trouvèrent que les Tentes, qui étoient à terre, et les cordages de réserve que le Centurion y avoit laissés par hazard, pourroient, en y ajoutant les voiles et les agrés de la Barque même suffire tellement quelement pour cette Barque quand elle seroit allongée : et comme ils avoient quantité de suif, ils resolurent de la mêler avec de la chaux, et de suifer la Barque de ce mélange, qu’ils savoient être très propre pour cela. Il paroit par tout ce que je viens de dire, que pour ce qui regarde l’équipement, il ne s’en fallbit guère que tout ne fût assez bien ; mais il restoit un terrible înconvénient, qui étoit la petitesse de ce nouveau Vaisseau malgré tout l’allongement qu’on pouvoit lui donner, il ne devoit pas même être, de quarante tonneaux, ce qui le rendoit incapable