Page:Webb - Sept pour un secret, 1933.djvu/118

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oreiller un vieil indicateur trouvé dans le salon et se mit péniblement à chercher les trains pour Londres.

Elle aurait été bien surprise si elle avait su que les amis de Robert — dans un roman on aurait dit ses complices — allaient bientôt surveiller discrètement, tout en allant à leur travail, le départ de tous les trains et que la petite femme de ménage de Mme Fanteague serait dès le lendemain dans la confidence de Johnson, trouverait l’indicateur le lendemain matin et informerait le Bohémien des moindres mouvements de la jeune fille.

Elle n’aurait pas été moins étonnée si elle avait pu jeter un coup d’œil dans le grenier où Robert avait sa chambre, dont la porte était si basse qu’il était obligé de se baisser pour la franchir, bien qu’il fût de taille moyenne. Là, sous le plafond au plâtre écaillé, Robert allait et venait dans sa mansarde, à la lueur de la lune et d’un bout de chandelle. Sur la cheminée était posé le soldat romain et devant lui un ancien ruban de cheveux à Gillian. Il marchait sur ses chaussettes, car les souliers étaient interdits sur l’escalier blanc du grenier et aux Gwlfas on ne connaissait pas les pantoufles. Et tout en allant et venant il se récitait le poème qu’il avait composé sur la route du retour :

Est-ce une fille cruelle que Gillian des Gwlfas ?
Les oiseaux me le demandent et tous les animaux de la lande.
Est-elle cruelle ? Elle a étouffé un oiseau pour se parer
et c’est notre sang qui fait briller ses joues ?
A-t-elle le cœur dur, Robert Rideout ?
Je répondrai aux oiseaux et aux habitants des Gwlfas :
Ah ! elle a le cœur dur aujourd’hui. Elle n’a eu aucun chagrin,
sauf une cicatrice au front. Quand son coeur aura été meurtri,
elle vous aimera tous, oiseaux et habitants des Gwlfas.