Page:Webb - Sept pour un secret, 1933.djvu/198

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mais Mlle Émilie l’avait choisi et vous n’aviez pas le droit de le lui prendre.

— Tante Émilie est vieille et laide.

— Elle n’est pas laide… un peu vieille, peut-être. Mais il ne lui reprochait rien, jusqu’au jour où vous l’avez séduit.

— Je ne l’ai pas séduit.

— Inutile de nier, Gillian, je connais vos façons. Il faut écrire une longue lettre — cendres et poussière — à votre tante Émilie, et une autre à Mme Fanteague. Et il faudra que vous fassiez une croix en fleurs pour la tombe de M. Gentil.

— Avec quoi faudra-t-il la faire ? — Gillian avait toujours un ton de défi, mais était curieuse. — Rien n’est en fleur.

— Les épines noires et les ajoncs sont fleuris, vous la ferez avec ces arbustes-là, et sans mettre de gants, Gillian. Et quand vous aurez les mains en sang, il faudra dire : « J’ai contribué à faire mourir M. Gentil comme j’ai tué le canard ardoise… pour me parer. »

— Mais rien qu’une petite gerbe ? implora-t-elle.

— Non, une grande. Je ferai la carcasse et vous la garnirez. Il y a une belle touffe de perce-neige dans notre jardin, vous pourrez les y mettre. Là, maintenant c’est fini.

— Ce ne sera jamais fini, Robert Rideout : je vous haïrai jusqu’à mon dernier jour.

— Êtes-vous capable de rentrer à pied du Donjon ?

— Oui, mais je préfère m’en aller toute seule.

— Vous prendrez une tasse de thé à la taverne, et puis nous partirons.

Le thé ne ressembla pas du tout à celui de l’embranchement, mais Robert y prit plaisir, après la veille, la soirée précédente et l’émotion de ce jour-là.