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SEPT POUR UN SECRET…

donc pourquoi il s’était sacrifié : pour que Gillian devienne un objet de risée ! Il s’avança, avec une expression si terrible que Ralph se baissa presque.

— Est-ce vrai ? dit-il. Est-ce vrai ?

Il parlait très bas, pour que Gillian n’entendit pas. Il avait saisi Ralph au collet, ivre de fureur. L’autre ne put dire que :

— Comment a-t-elle appris ? Oh, comment a-t-elle appris ?

Il était stupéfait.

Ruth s’était accroupie au pied du tableau noir. Ce fut Fringal qui se ressaisit le premier, et il s’interposa entre Ralph et Robert.

— Vous ne voyez donc pas qu’elle est folle ? dit-il. Elle sait écrire, mais elle a perdu la raison. Il faut l’envoyer dans un asile.

Ralph soupira, comme un homme qui revient à la vie après un évanouissement.

C’était cela ! Elle était folle. Voilà ce qu’il fallait dire et personne ne la croirait. D’ailleurs… Robert ne pouvait pas assembler ces mots, il n’en avait pas la clef. C’était assez dangereux, surtout parce que Ruth nommait des Bohémiens, mais c’était réparable. Il fallait la faire partir sur-le-champ, il aurait à obtenir un certificat médical… quelques jours suffiraient pour cela, et alors ! Après tout, Fringal gagnait bien le pain qu’il mangeait.


Le piano se tut : Gillian venait. Robert bondit, effaça l’écriture sur le tableau avec sa manche et chuchota à Ruth :

— Ne faites pas savoir à Gillian que vous êtes la femme d’Elmer. Si elle ne vous aimait pas, murmura-t-il à Elmer en regagnant sa place, je vous tuerais.

Et elle se tenait là, très pâle sous la lampe, très calme.