Page:Weiss - À propos de théâtre, 1893.djvu/237

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

y avait de rigide, de correct et de raisonnable dans sa piété, le portait à considérer comme une offense à la foi autant que comme une faute de goût l’appropriation à une œuvre d’art de dogmes qu’il sentait graves et de mystères qu’il concevait terribles. Frœhlich die Kunst… Boileau eût été disposé à dire également selon les jours : « Sérieuse est la foi, et auprès d’elle futile est l’art », ou bien : « Riant, simple est l’art, et, auprès de lui, triste et compliquée est la foi. » La Jérusalem délivrée ne lui paraissait pas démontrer suffisamment que ce double principe de sa conscience et de son goût fût faux ; et, pour cela, il avait raison, quel que soit, à d’autres titres, l’attrait de la Jérusalem. Mais combien il devait plus s’enfoncer encore en son opinion, lorsque les Modernes, joignant l’exemple au précepte, se piquaient d’écrire des bucoliques saintes, lorsque Desmarest donnait le poème de Marie-Madeleine (1669) avec celui d’Esther (1673), et Perrault, le poème bien intentionné, mais si puéril et si fade, de Saint-Paulin (1684). Aussi, lorsque Racine lui vint parler d’une tragédie à tirer d’Esther, son premier mouvement fut de le décourager de l’entreprise. Racine persista ; Boileau se soumit ; Esther parut. Racine avait donné aux théories de Perrault et de son école sur l’emploi qu’on pouvait faire en poésie de la religion chrétienne une confirmation autrement