Page:Weiss - À propos de théâtre, 1893.djvu/354

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mule, de l’état de simple tourlourou de la pensée, monarchiste et par conséquent un peu crétin, au grade de maréchal de France des intelligences. Tel le démocrate Victor Hugo s’est épanoui de 1851 à 1875, tel il était en germe dès le temps de la Restauration.

Les odes royalistes et vendéennes, les Vierges de Verdun, Quiberon, la Naissance du duc de Bordeaux, le Sacre, les attentions flatteuses dont le poète était l’objet de la part du faubourg Saint-Germain et d’une aristocratie qui gardait encore en 1820 quelques-uns des caractères par où se justifient et s’imposent les aristocraties, la faveur vraiment royale dont Louis XVIII et Charles X soutinrent ses premiers pas, rien de tout cela n’empêchait que la rupture de Victor Hugo avec le gouvernement de la Restauration ne fût inévitable. Elle s’accomplit à l’occasion de Marion Delorme. Elle aurait pu s’accomplir à propos de Hernani. Il se produisit sur cette dernière pièce un soulèvement du vieux parti classique qui monta jusqu’au trône. Ce tapage tout littéraire eut pour effet de troubler l’attention de Charles X et de ses ministres et de la tromper sur les tendances morales, encore vagues, de ce romancero. Il souffle à travers tout le rôle de Hernani un esprit de révolte, glorifié par le poète, qui est bien autant populaire que féodal, qui sent son enfant de Paris