Page:Weiss - À propos de théâtre, 1893.djvu/89

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toricien. Il l’était, selon l’ancienne mode universitaire, raide et sec sur les principes, instruit, précis et circonscrit. Nous avons tous entrevu et connu, il y a trente ans, M. Bernard Jullien à la Revue de l’instruction publique où les premiers prosateurs du moment actuel ont écrit, à leurs débuts, des chefs-d’œuvre à un sou la ligne, sans lecteurs. M. Bernard Jullien unissait en lui, par une capacité rare, le grade de licencié ès sciences et celui de docteur ès lettres. Il avait été régent de collège et principal, et, en fin de compte, il s’était attaché à la maison Hachette et à la Revue de l’Instruction publique. C’était un jeu pour lui de composer des Cours raisonnés de langue française en vingt-trois volumes. Il traitait, à la Revue, des thèmes ou thèses de omni re ad usum scholarum, thèmes de grammaire, de littérature, de critique, de prosodie ; thèses sur les devoirs et les procédés de l’instituteur dans son école, du professeur dans sa classe. Il se fit même, à propos d’une de ces thèses, une forte querelle avec Sainte-Beuve, dont il avait discuté et égratigné la prosodie.

Ce fut, je m’en souviens, l’une des plus plaisantes fureurs de Sainte-Beuve, aigle royal qui était sujet à des colères de dindon. Il massacra littéralement, dans un de ses Lundis, l’honnête et juste M. Bernard Jullien qui ne s’attendait à rien de pa-