Page:Wilde - Le Crime de Lord Arthur Savile, trad. Savine, 1905.djvu/208

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la rose demeurait blanc, car le sang seul d’un rossignol peut empourprer le cœur d’une rose.

Et la rose cria au rossignol de se presser plus étroitement contre les épines.

— Pressez-vous plus étroitement, petit rossignol, disait-il, ou le jour surviendra avant que la rose ne soit terminée.

Alors le rossignol se pressa plus étroitement contre les épines, et les épines touchèrent son cœur, et en lui se développa un cruel tourment de douleur.

Plus amère, plus amère était la douleur, plus impétueux, plus impétueux jaillissait son chant, car il chantait l’amour parfait par la mort, l’amour qui ne meurt pas dans la tombe.

Et la rose merveilleuse s’empourpra comme les roses du Bengale. Pourpre était la couleur des pétales et pourpre comme un rubis était le cœur.

Mais la voix du rossignol faiblit. Ses petites ailes commencèrent à battre et un nuage s’étendit sur ses yeux.

Son chant devint de plus en plus faible.