Page:Wilde - Le Portrait de monsieur W. H., trad. Savine, 1906.djvu/92

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Sitôt qu’elle eut quitté la pièce, je me tournai vers le docteur et lui dis :

— Quelle épouvantable secousse cette mort a dû être pour lady Erskine. Je suis surpris qu’elle la supporte comme elle l’a fait.

— Oh ! Il y a des mois qu’elle était prévenue de ce qui allait arriver, répondit-il.

— Elle était prévenue depuis des mois ! m’écriai-je, mais comment ne l’en a t-elle pas détourné ? Comment n’a-t-elle pas veillé sur lui ? Il devait être fou.

Le docteur me regarda avec de grands yeux.

— Je ne comprends pas ce que vous voulez dire, fit-il.

— Bah ! m’écriai-je, si une mère sait que son fils va se suicider…

— Se suicider ! répondit-il. Le pauvre Erskine ne s’est pas suicidé. Il est mort de consomption… Il est venu mourir ici. Sitôt que je le vis, je compris qu’il n’y avait pas d’espoir. Un poumon était presque perdu ; l’autre était très atteint. Trois jours avant sa mort, il me demanda s’il n’y avait plus d’espoir. Je lui répondis franchement qu’il