Page:Wilde - Poèmes, trad. Savine, 1907.djvu/63

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 «Non, bien que tu sois un Dieu, ne te montre
 point si farouche; car là-bas il est une petite canne
 qui redit souvent à voix basse comment un jeune
 charmeur la séduisit un jour sur l'herbe de la
 prairie et quand il se fut donné tout son cruel plaisir,
 déploya des ailes d'or toutes bruissantes, et
 s'envola vers le soleil.
 «Ne sois pas si timide; le laurier tremble encore
 des baisers du grand Apollon, et le pin, dont
 les soeurs groupées couronnent la colline, pourrait
 en dire long sur le hardi ravisseur que les hommes
 appellent Borée; et j'ai vu les yeux narquois d'Hermès
 à travers le feuillage argenté du peuplier.
 «Même les jalouses Naïades me disent jolie, et
 chaque matin un jeune galant au teint hâlé me fait
 la cour, en m'offrant des pommes et des boucles de
 cheveux; il cherche à vaincre mon dédain virginal,
 avec les dons qu'aiment les charmantes nymphes
 des bois; hier encore il m'apporta une colombe au
 plumage irisé,
 «aux petits pieds de couleur cramoisie, que le
 cruel enfant avait dérobée au sommet d'un sycomore,
 avec sa ponte de sept oeufs tachetés, pendant
 que le mâle amoureux s'était envolé au loin pour
 chercher des baies de genièvre, leur nourriture préférée;
 la guêpe fantasque, la plus hâtive des vendangeuses,