Page:William Morris - Nouvelles de Nulle Part.djvu/190

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déversant par les rues qui conduisaient à la grande route du sud, qui descend vers le Palais du Parlement (encore existant aujourd’hui et appelé le marché-au-Fumier), et aussi par le quai de la Tamise, s’avança, resserrant la foule en une masse de plus en plus compacte et se forma le long du côté sud du square.

La foule étroitement comprimée ne voulut ou ne put pas bouger, si ce n’est sous l’influence du paroxysme de terreur qui devait bientôt lui être communiqué. Un petit nombre d’hommes armés essayèrent de se faire un chemin jusqu’au premier rang ou grimpèrent sur le piédestal du monument qui était là à cette époque, pour pouvoir faire face au mur de feu caché devant eux ; il semblait à la plupart des hommes (il y avait beaucoup de femmes parmi eux) que la fin du monde fût arrivée, et aujourd’hui paraissait étrangement différent d’hier. « Aussitôt que les soldats furent rangés en bataille, dit un témoin oculaire, un brillant officier à cheval sortit tout fringant des rangs du sud et lut quelque chose sur un papier qu’il tenait à la main ; ce quelque chose, très peu l’entendirent ; mais on m’a raconté plus tard que c’était un ordre de nous disperser et un avertissement que, sinon, il avait légalement le droit de tirer sur la foule, et qu’il le ferait. La foule prit cela pour une sorte de défi et elle répondit par un mugissement rauque, menaçant ; ensuite, il y eut un silence relatif, jusqu’à ce que l’officier eût rejoint sa place. Je me trouvais près de la limite de la foule, non loin des soldats, dit ce