Page:William Morris - Nouvelles de Nulle Part.djvu/298

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certainement très heureux ; mais vous pouvez être sûre que nous n’aurions pas manqué, Clara et moi du moins, d’aller vous voir, et d’y retourner si nous ne vous avions pas trouvés la première fois. Mais, chère voisine, vous êtes seule dans votre barque et vous avez ramé assez dur, il me semble ; vous aurez plaisir à vous asseoir un peu tranquillement ; nous ferons bien de nous partager.

— Oui, dit Ellen, j’ai pensé que vous le feriez, et j’ai pris un gouvernail dans ma barque ; voulez-vous m’aider à le fixer, je vous prie ?

Elle alla à l’arrière du bateau, qu’elle poussa le long du nôtre, jusqu’à ce que la poupe fût à portée de Dick. Il s’agenouilla dans notre barque et elle dans la sienne, et ils placèrent, après les tâtonnements ordinaires, les crochets du gouvernail ; car, comme bien vous pensez, aucun changement ne s’était produit dans la disposition d’une chose aussi peu importante que le gouvernail d’une barque de plaisance. Comme les deux jeunes figures se penchaient sur le gouvernail, elles me parurent être très près l’une de l’autre ; cela ne dura qu’un instant, et pourtant une sorte d’angoisse me saisit à cette vue. Clara était assise à sa place et ne se retourna pas ; elle dit, sans la moindre raideur dans le ton :

— Comment nous partagerons-nous ? Vous allez monter dans la barque d’Ellen, Dick, puisque, soit dit sans offenser notre hôte, vous êtes le meilleur rameur ?