Page:William Morris - Nouvelles de Nulle Part.djvu/331

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posa ses mains et ses beaux bras hâlés sur le mur couvert de lichen comme pour l’embrasser, et s’écria :

— Oh ! oh ! que j’aime la terre, et les saisons, et l’air, et toutes choses, et tout ce qui vit, comme ceci !

Je ne pus lui répondre, ni dire un mot. Sa joie, son allégresse, étaient si vives et pénétrantes, et sa beauté si fine, où pourtant l’énergie était si bien marquée, leur donnait une expression si parfaite, que toute parole eût été banale et futile. J’avais peur de voir les autres arriver tout à coup et rompre le charme dont elle m’enveloppait ; mais nous restâmes là un moment, au coin du gros pignon de la maison, et personne ne vint. Bientôt j’entendis les voix gaies à quelque distance, et je compris qu’ils suivaient la rivière, vers la grande prairie de l’autre côté de la maison et du jardin.

Nous reculâmes un peu, pour regarder la maison : la porte et les fenêtres laissaient entrer l’air embaumé, séché par le soleil ; aux rebords des fenêtres supérieures étaient suspendus des festons de fleurs en l’honneur de la fête, comme si les autres partageaient notre amour de la vieille maison.

— Entrez, dit Ellen. J’espère que rien ne la gâtera à l’intérieur ; et je ne le pense pas. Venez ! il va falloir rejoindre les autres. Ils sont allés aux tentes ; car certainement ils doivent avoir des tentes plantées pour les faneurs : la maison ne pourrait pas contenir un dixième des gens, j’en suis sûre.