physiques et psychologiques, la simple description de ces faits ne contient rien que l’on pourrait qualifier de proposition éthique. Le meurtre sera placé exactement au même niveau que n’importe quel autre événement, par exemple la chute d’une pierre. Certainement la lecture de sa description pourrait nous causer de la peine ou de la colère ou toute autre émotion, ou on pourrait aussi bien lire de la peine ou la colère qui ont été causées à d’autres gens quand ils l’ont appris, mais il n’y aura là que de simples faits – des faits et des faits, mais pas d’Éthique. Alors je dirais que si je contemple ce que l’Éthique devrait vraiment être si une telle science existait, le résultat me paraît évident. Il me semble évident que rien que l’on pourrait jamais penser ou dire ne serait la chose. Que nous ne pouvons pas écrire un livre scientifique dont le sujet serait intrinsèquement sublime et au-dessus de tous les autres sujets. Je ne peux que décrire mon sentiment avec la métaphore suivante, à savoir que si une personne écrivait un livre sur l’Éthique qui était véritablement un livre sur l’Éthique, ce livre détruirait, en explosant, tous les autres livres au monde. Nos mots, utilisés de la manière dont on les utilise dans les sciences, sont des vaisseaux capables de contenir et de véhiculer seulement des significations et du sens, des significations et du sens naturels. L’Éthique, si elle est quelque chose, est super-naturelle et nos mots ne peuvent exprimer que des faits : comme une tasse ne pourra jamais que contenir une tasse d’eau, quand bien même je serais à y verser un gallon. J’ai dit qu’en ce qui concerne des faits et des propositions, il n’y a que de la valeur relative et un bien relatif, un juste relatif etc. Le bon chemin est le chemin qui mène à une fin prédéterminée de manière arbitraire et il nous est assez clair qu’il n’y a pas de sens à parler de bon chemin hors du cadre d’un tel objectif prédéterminé. Maintenant voyons ce que nous pourrions éventuellement vouloir dire en utilisant l’expression « le chemin absolument bon ». Je pense que ce serait le chemin que tout le monde devrait emprunter en le voyant, avec une nécessité logique, et honte à ceux qui ne l’emprunterait pas. Et de même pour le bien absolu, s’il était un état des choses descriptible ce serait un bien que tout le monde, indépendamment de ses goûts et inclinations, devrait nécessairement faire advenir ou se sentir coupable de ne pas faire advenir. Et je voudrais dire qu’un tel état des choses est une chimère. Aucun état des choses n’a en lui ce que je voudrais appeler le pouvoir coercitif d’un juge absolu. Mais sinon, qu’avons nous tous en tête qui comme moi sommes toujours tentés d’utiliser des expressions telles que « bien absolu », « valeur absolue », etc., qu’avons nous en tête et que voulons nous exprimer ? À chaque fois que j’essaie de me rendre cela clair [make this clear to myself] il est normal que je me rappelle de cas où j’utiliserais sans aucun doute ces expressions et je me trouve alors dans la situation dans laquelle vous seriez si j’étais à vous donner,
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Apparence