Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 1.djvu/281

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cithariste assez joué de la cithare, et que tous deux parurent avoir suffisamment amusé : « Par Jupiter ! dit Socrate, tu nous traites splendidement, Callias ! Ce n’est point assez d’avoir servi un repas magnifique ; tu nous donnes un spectacle et une musique des plus agréables. » Alors Callias : « Mais si l’on nous apportait encore des parfums, nous jouirions de leur senteur. — Pas du tout, reprit Socrate ; de même que tel vêtement convient à une femme, tel autre à un homme, ainsi tel parfum convient à un homme, tel autre à une femme ; et jamais homme ne se parfume pour un autre homme. Cependant les femmes, et surtout les jeunes épouses, comme celles de Critobule et de Nicératus, se plaisent aux parfums ; elles aiment à en exhaler l’odeur. Mais celle de l’huile des gymnases paraît aux hommes plus agréable qu’un parfum ne l’est aux femmes, au moment où ils la respirent, et plus désirable quand ils ne la respirent pas. Qu’un esclave et un homme libre se parfument, tous deux à l’instant même exhaleront une égale senteur ; mais l’odeur que répandent les exercices libéraux a besoin d’application et de temps pour acquérir cette suavité qui caractérise l’homme libre. » Alors Lycon : « Cela va bien aux jeunes gens ; mais nous qui ne fréquentons plus les gymnases, quelle odeur devons-nous exhaler ? — Par Jupiter ! celle de la vertu, dit Socrate. — Et où prend-on ce parfum ? — Ce n’est pas, ma foi, chez les parfumeurs. — Où donc enfin ? — Théognis nous l’apprend[1] :

L’honnête homme du bien te montre le sentier ;
Le méchant te corrompt et te perd tout entier. »


Alors Lycon ; « Tu entends cela, mon fils ? — Sans doute, reprit Socrate, et il profite. Et comme il a eu le désir d’être vainqueur au pancrace, parce qu’il t’a pris pour modèle, c’est d’après ton avis que celui qui lui paraîtra le plus propre à lui enseigner la bonne voie, deviendra son guide[2]. »

À ces mots, ils se mirent tous à parler ; et l’un disait : « Mais où trouver un maître de cette science ? » Un autre soutenait qu’elle ne s’enseigne point ; un troisième qu’il n’y a rien de si facile à apprendre. Alors Socrate : « Puisqu’il y a doute, renvoyons la question à un autre moment : achevons à présent de qui est commencé. Pour moi, je vois la danseuse qui attend et à laquelle on apporte des cerceaux. » Sur cela, la

  1. Vers 35.
  2. Ce passage laisse à désirer pour la netteté : j’ai suivi les textes de Zeune et de Bornemann.