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la vertu trouvent en moi, comme dans leurs compatriotes, un amant passionné. »

Tandis que les autres convives faisaient des observations sur ce discours, Autolycus regardait Callias, et Callias lui jetait un regard furtif : « Ainsi donc, Socrate, tu vas si bien me servir d’entremetteur auprès de la république, que je vais être lancé dans la politique, que je plairai toujours au peuple ? — Oui, par Jupiter ! répondit Socrate, si l’on te voit réellement, et non pas en apparence, épris de la vertu. La fausse gloire est bientôt démasquée par l’expérience ; mais la véritable valeur, à moins qu’un dieu ne lui soit contraire, acquiert par l’action même une gloire de plus en plus brillante. »


CHAPITRE IX.


Représentation du mariage d’Ariadne et de Bacchus[1].


La conversation finit là. Autolycus, comme c’était l’heure, sortit pour faire sa promenade. Lycon, son père, sortit avec lui, et se retournant : « Par Junon ! Socrate, dit-il, tu m’as l’air d’un homme beau et bon ! »

Sur ce point, on place une sorte de trône au milieu de la salle ; vient ensuite le Syracusain : « Citoyens, dit-il, voici Ariadne qui entre dans la chambre nuptiale destinée à elle et à Bacchus. Bientôt va paraître Bacchus, qui a un peu bu chez les dieux ; il va s’approcher d’elle, et tous les deux se mettront à folâtrer. » Après ce prologue, Ariadne entre parée comme une jeune épouse et s’assied sur le trône ; ensuite, à l’entrée de Bacchus, la flûte se met à jouer un air bachique. Ce fut alors qu’on admira le maître de danse. À peine Ariadne a-t-elle entendu cet air qu’elle fait des gestes qui font comprendre à tous la joie qu’elle en éprouve, et, quoiqu’elle n’aille point à sa rencontre, quoiqu’elle ne se lève point, on voit qu’elle a peine à se contenir. Aussitôt que Bacchus l’aperçoit, il se met à danser de l’air le plus passionné, s’assied sur ses genoux, l’embrasse et lui donne des baisers. Ariadne prend un air pudique, et ce-

  1. Cf. Lucien, De la danse. 43, et voy. l'Excursus de Bœttiger sur cette danse mimique, dans l’édition du Banquet de Xénophon d’Aug. Bornemann, p. 223 et suivantes.