Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 1.djvu/63

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dissertation placée par Weiske en tête de ce traité, nous ne pouvons nous rendre à l’opinion généralement reçue, et nous inclinons à celle du savant éditeur allemand, qui voit dans ce traité un ouvrage de la jeunesse de Xénophon. Outre les raisons dont il appuie son sentiment, la réflexion nous en a suggéré d’autres qui sont loin de l’infirmer.

Et d’abord la phrase dont on argue ne prouve absolument rien en ce qui concerne l’âge de Xénophon. Il n’est pas nécessaire d’avoir quatre-vingt-neuf ans, pour souhaiter de voir, avant de mourir, la prospérité de sa patrie : c’est un souhait que Xénophon pouvait tout aussi bien faire, quand il en avait vingt-neuf.

En second lieu, si l’on admet qu’il ait écrit ses Mémoires d’après des notes recueillies durant les entretiens de Socrate, comment oublier la conversation du grand philosophe avec le jeune Glaucon ? Citons-en quelques traits : « Voudrais-tu d’abord, lui dit Socrate, de la même manière que s’il s’agissait d’enrichir la maison d’un ami, t’efforcer d’enrichir la république ? — Je le voudrais. — Le moyen de la rendre plus riche, n’est-ce pas de lui procurer de plus grands revenus ? — C’est tout naturel. — Dis-nous donc d’où se tirent aujourd’hui les revenus de l’État, et quel en est le chiffre ? Il est évident que tu en as fait une étude, afin de pouvoir suppléer aux produits qui se trouveraient trop faibles et remplacer ceux qui viendraient à manquer. — Mais, par Jupiter, reprit Glaucon, je n’y ai jamais songé. — Puisque tu n’as pas songé à ce point, dis-nous au moins quelles sont les dépenses de la ville ; car il est certain que tu as l’intention de diminuer celles qui sont superflues. — Ma foi, je ne m’en suis pas non plus occupé. — Eh bien, remettons à un autre temps le projet d’enrichir l’État : comment, en effet, y songer avant de connaître les dépenses et les revenus ? » Et plus loin : « Je sais, ajouta Socrate, que tu n’as pas été voir les mines d’argent, de sorte que tu ne peux pas dire pourquoi elles produisent moins qu’autrefois. — En effet, je n’y ai pas encore été. — On dit, ma foi, que l’air y est malsain ; et conséquemment, si l’on vient à en délibérer, tu auras là