Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/169

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Alors Anaxibius mande Xénophon, et le presse de mettre en œuvre tous les moyens, tous les ressorts pour s’embarquer et joindre l’armée dans le plus bref délai, de la tenir réunie, de rassembler le plus possible de soldats dispersés, et de les conduire à Périnthe pour passer le plus vite possible en Asie. Il lui donne un triacontore ainsi qu’une lettre, et envoie avec lui un homme chargé d’ordonner aux habitants de Périnthe de fournir immédiatement des chevaux à Xénophon pour se rendre à l’armée. Xénophon part et arrive à l’armée : les soldats le reçoivent avec joie et s’empressent de le suivre, dans l’espoir de repasser de Thrace en Asie.

De son côté, Seuthès, apprenant le retour de Xénophon, lui envoie par mer Médosade pour le prier de lui amener l’armée et lui faire des promesses qu’il croit capables de le séduire. Xénophon répond qu’on lui demande une chose qu’il leur est impossible d’exécuter. Médosade repart avec cette réponse. Dès que les Grecs sont arrivés à Périnthe, Néon se détache et campe séparément à la tête d’environ huit cents hommes. Tout le reste de l’armée demeure réuni et campe sous les murs de Périnthe.

Cependant Xénophon cherche à se procurer des bâtiments pour passer au plus vite en Asie. Au même moment l’harmoste Aristarque arrive à Byzance avec des trirèmes, et, gagné par Pharnabaze, il défend aux maîtres des navires de passer l’armée, se rend au camp, et défend également aux soldats de passer en Asie. Xénophon répond qu’il en a reçu l’ordre d’Anaxibius : « C’est pour cela, dit-il, qu’il m’a envoyé ici. » Aristarque répond : « Anaxibius n’est plus chef de la flotte ; et moi, je suis l’harmoste de ce pays. Si j’en prends un seul de vous sur la mer, je le coule. » Cela dit, il rentre dans les murs.

Le lendemain, il mande les stratèges et les lochages. Ils étaient déjà près du mur, lorsqu’on avertit Xénophon que, s’il entre, on va l’arrêter et lui faire subir quelque mauvais traitement ou le livrer à Pharnabaze. Sur cet avis, Xénophon laisse les autres aller en avant, et dit qu’il a personnellement un sacrifice à faire. Il revient donc et fait un sacrifice pour savoir si les dieux lui permettent de conduire l’armée à Seuthès. En effet, il ne croyait pas qu’il fût sûr pour elle de traverser la Propontide, Aristarque ayant des trirèmes pour l’en empêcher ; et il ne voulait pas non plus aller s’enfermer dans la Chersonèse, où l’armée aurait manqué de tout. D’ailleurs, il aurait fallu obéir à l’harmoste, et l’on n’aurait pas pu s’y procurer de vivres.