Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/387

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plongés dans le sommeil et dans l’ivresse ; tous sont en pleine confusion ; et quand ils nous verront dans leurs murs, ils seront encore moins prêts à a^ir, vu leur effroi. Si quelqu’un de vous redoute ce qu’on dit, qu’il faut craindre, quand on entre dans une ville, que les habitants ne vous écrasent du haut des maisons ; rassurez-vous complètement : s’ils montent sur leurs toits, nous avons pour allié le dieu Vulcain. Leurs portiques sont de matières combustibles ; les portes faites de bois de palmier, enduites d’un bitume inflammable : nous avons beaucoup de torches qui produiront vite un grand embrasement : nous avons de la poix et de l’étoupe, qui reçoit la flamme avec rapidité ; en sorte qu’il faudra bien qu’ils s’enfuient en hâte de leurs maisons ou qu’ils y soient brûlés. Allez donc ! prenez vos armes : je vous conduirai avec l’aide des dieux. Vous, Gadatas et Gobryas, montrez-nous le chemin : vous le connaissez ; quand nous serons entrés dans la ville, conduisez-nous droit au palais du roi. — Il ne serait pas étonnant, dit Gobryas, que les portes en fussent ouvertes durant cette nuit où toute la ville est en liesse ; mais cependant nous trouverons une garde près des portes : il y en a toujours une d’établie. — Il ne faut pas négliger cet avis, dit Cyrus ; mais allons, afin de prendre tous ces gens au dépourvu. »

Cela dit, on se met en marche. Tous ceux qu’on rencontre sont frappés et mis à mort, d’autres s’enfuient dans leurs demeures, d’autres jettent de grands cris : les soldats de Gobryas répondent à ces cris comme s’ils étaient en fête avec eux, et se rendent en toute hâte au palais du roi. La troupe, rangée sous les ordres de Gobryas et de Gadatas, trouve les portes du palais fermées : ceux qui ont ordre d’attaquer les gardes fondent sur eux, pendant qu’ils boivent autour d’un grand feu, et les traitent en ennemis. Un grand bruit, des cris s’élèvent : ceux de l’intérieur entendent ce désordre. Le roi ordonne de voir ce qu’il en est, et quelques-uns accourent en ouvrant les portes. Gadatas et sa troupe, voyant les portes ouvertes, fondent sur ceux qui voulaient sortir et qui retournent sur leurs pas, les frappent et arrivent auprès du roi ; ils le trouvent debout, un cimeterre nu à la main. Une foule des soldats de Gadatas et de Gobryas mettent la main sur lui : il est tué avec ceux qui l’entourent, l’un cherchant à parer le coup, l’autre fuyant, d’autres se défendant avec tout ce qu’ils peuvent. Cyrus envoie par toutes les rues des escadrons de cavalerie, avec ordre de massacrer tous ceux qu’ils trouveront dehors, et il fait inviter, par des crieurs